Cet article a été publié sur Les Marchés, le Média de l’alimentaire.
Le 13 septembre 2018, en session plénière, les députés européens ont voté massivement en faveur d’une résolution non législative appelant les États membres, la Commission et les associations de consommateurs, à lutter davantage contre le phénomène de « qualité différenciée » des denrées alimentaires. Décryptage.
Le règlement concernant l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires, dit règlement Inco, exige que les informations données aux consommateurs soient loyales, et ne les induisent pas en erreur quant aux caractéristiques des produits, notamment sur leur nature, identité, qualité, composition ou mode de fabrication. Il est toutefois possible pour les producteurs de vendre des produits adaptés aux préférences locales et aux goûts du pays de destination, à condition de ne pas tromper le consommateur. Ainsi, si un opérateur vend un produit dans toute l’Union européenne (UE) avec une composition qui varie d’un pays à l’autre, il ne doit pas l’étiqueter de façon identique. Or, des enquêtes menées dans plusieurs États membres de l’UE, principalement en Europe de l’Est, ont démontré que des produits vendus sous la même marque et dans des emballages apparemment identiques différaient, par leur composition et leurs ingrédients, parfois de manière significative.
Aussi, afin d’aider les autorités nationales à déterminer si une entreprise enfreint le droit de l’UE en vendant des produits de qualité différenciée, la Commission a publié en septembre 2017 une communication expliquant comment appliquer le règlement Inco, ainsi que la directive sur les pratiques commerciales déloyales, en préconisant une approche au cas par cas, qui prenne en compte le marketing, l’écart de composition et le degré d’information des consommateurs quant à cette différence. Mais ces lignes directrices seraient, aux dires des parlementaires, insuffisantes pour lutter contre ce phénomène.
New deal pour les consommateurs
Au printemps 2018, la Commission s’est à nouveau saisie du problème. En premier lieu, dans le cadre d’une initiative intitulée « new deal pour les consommateurs », elle a annoncé, en mars, qu’elle lançait un centre de connaissances pour améliorer la qualité des denrées alimentaires et renforcer la lutte contre la fraude alimentaire, qui sera géré par le Centre commun de recherche (CCR).
Puis, en avril, elle a publié une proposition d’amendements de plusieurs directives relatives à la protection du consommateur, notamment celle sur les pratiques commerciales déloyales, introduisant la notion de « double niveau de qualité », comme une pratique commerciale trompeuse.Elle suggère également que les États membres fixent, dans leur droit national, des amendes correspondant à au moins 4 % du chiffre d’affaires annuel du professionnel reconnu coupable d’infractions de grande ampleur qui portent préjudice aux consommateurs dans plusieurs États membres.
Enfin, en juin, le CCR a indiqué avoir mis au point une méthodologie commune permettant aux autorités nationales chargées de la protection des consommateurs de réaliser des tests visant à comparer la composition et les caractéristiques des produits alimentaires vendus dans l’UE sous un emballage similaire.
L’intervention du Parlement européen
Mais les parlementaires européens incitent la Commission à améliorer également la coopération transfrontière et le partage des informations entre les États et les associations de consommateurs, afin d’identifier les produits ne respectant pas la législation, ainsi qu’à mettre en place un cadre juridique permettant l’indemnisation des consommateurs par les producteurs, en cas de violation de leurs droits.
C’est pourquoi, ils ont adopté le rapport (précité) déjà validé en juin, de la Commission du marché intérieur et de la protection des consommateurs (Imco).Les députés, à cette occasion, appellent les fabricants à apposer un logo sur l’emballage de leurs produits d’une même marque, informant le consommateur que le contenu et la qualité sont les mêmes dans tous les États membres.
Il revient maintenant à la Commission européenne d’étudier ce rapport et de prendre éventuellement en compte certaines de ses préconisations. Le débat se poursuivra parallèlement au sein de la commission Imco, chargée de la proposition législative de la Commission modifiant la directive sur les pratiques commerciales déloyales.